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Pratiquer le jeûne intermittent quand on est une femme… bonne idée d'après la science ?



Il y en a peu, mais certaines études ont montré que le corps féminin réagit de manière différente au jeûne intermittent. Alors voyons ensemble de quoi il s’agit, et si le jeûne intermittent est toujours une bonne idée quand on est une femme.


La faim plus difficile à gérer


Je vous entend crier au cliché si je dis que les femmes ont “faim tout le temps”, et bien sûr ce serait un peu exagéré. Cela dit, il me semble voir plus souvent des dames se balader avec des petits snacks dans leur sac que des messieurs.


Avant de m’accuser de sexisme, rassurez-vous, la science a une explication rationnelle à ce que j’avance là.


D’abord parlons des œstrogènes, que l’on appelle aussi l’hormone femelle primaire. Produits par les ovaires et le placenta, ils sont issus (comme chez les hommes) des androgènes, qui par ailleurs se convertissent parfois plutôt en testostérone, l’hormone mâle primaire.


Comme l’expliquent Gillies et McArthur (1), en plus de leurs actions sur l’ovulation et les comportements reproductifs, les œstrogènes semblent également jouer en rôle dans diverses autres fonctions cérébrales. Par exemple, sur l’apprentissage, la mémorisation ou l’humeur.


Il existe trois œstrogènes naturels : l’estriol, l’estrone et l’estradiol. Nous, nous allons plutôt nous intéresser à cette dernière qui est beaucoup plus puissante que les autres.


D’après l’expérimentation de Frazao et al. (2) sur des souris, les récepteurs de ghréline et ceux d’estradiol sont co-exprimés dans de nombreuses zones de l’hypothalamus. Pour rendre ce charabia scientifique un peu plus clair, sachez que la ghréline est aussi appelée “hormone de la faim”, et que l’hypothalamus régule beaucoup de grandes fonctions comme la faim, la soif, le sommeil ou la température corporelle .


Donc, ce que les auteurs démontrent, c’est qu’une grande circulation d’estradiol stimule les récepteurs de ghréline en de nombreux endroits de l’hypothalamus, ce qui accentuerait la sensation de faim.


Sauf que la faim c’est déjà l’effet secondaire numéro 1 du jeûne intermittent. Et je sais combien cette sensation est difficile à gérer voire à tolérer. Ainsi mesdames, il se peut que vous passiez un jeûne un peu plus difficile que vos semblables masculins.


Le jeûne et la reproduction


Si le jeûne est connu pour son effet amincissant, c’est notamment parce qu’il conduit souvent les pratiquants à manger moins. Forcément, avec une fenêtre de temps relativement courte pour manger, on ne mange pas pareil que lorsqu’on pouvait le faire du matin au soir.


Le problème, c’est que le corps féminin est particulièrement sensible à la quantité de nourriture consommée. Car pour lui, s’assurer d’avoir suffisamment à manger est essentiel pour être prêt à accueillir une grossesse.


Ainsi, comme le montrent Meczekalski et al. (3), si l’organisme féminin sent un danger de sous-alimentation il sécrète beaucoup moins d’hormone GnRH. Indirectement responsable de divers processus de reproduction, la baisse de GnRH peut conduire à une aménorrhée hypothalamique fonctionnelle, soit un dérèglement des fonctions de reproduction.


Ces troubles des menstruations et de la fertilité ont également été mis en évidence par Kumar et Kaur (4) auprès de rates. Dans leur expérience, une alimentation de type jeûne alternatif perturbe le cycle œstral et réduit le poids des ovaires, affectant donc la reproduction de ces femelles rats.


Bien sûr, il est important de prendre du recul face à ces expérimentations. D’abord, parce qu’elles ont toutes deux été conduites auprès d’animaux et non pas d’humains. Ensuite, parce que cet effet du jeûne sur la reproduction ne semble avoir lieu qu’en cas de sous-alimentation. Or, s’il est plus difficile de manger autant qu’avant en suivant un jeûne intermittent, ce n’est néanmoins pas impossible du tout.


D’autres petites différences physiologiques


Les corps mâle et femelle sont physiologiquement différents. Alors parfois, même avec un comportement similaire, les réactions de l’organisme peuvent varier un petit peu entre homme et femme.


Une étude de Heilbronn et al. (5) a trouvé qu’avec un jeûne type “un jour sur deux”, on retrouve une légère altération de la tolérance au glucose chez les femmes, mais pas chez les hommes.


De leur côté, Freire et al. (6) se sont intéressés à ces différences induites par le jeûne intermittent, en se servant de souris. Si les auteurs ont trouvé des effets du jeûne similaires dans la prise de nourriture, la composition corporelle et certains marqueurs métaboliques, ils ont également découvert des différences entre les sexes.


Notamment, les femelles rats soumises au jeûne intermittent ont une capacité de lipogenèse et de stockage de triglycérides plus élevée :


- la lipogenèse est la synthèse d’acides gras à partir de sources non lipidiques (notamment les glucides).

- les triglycérides sont un type de lipide qu’on retrouve dans le sang, ils correspondent au gras non utilisé et donc stocké dans la masse graisseuse.


Mais également (et ça ce sont des bonnes nouvelles), les rates de l’expérimentation de Freire et al. (6) ont des taux d’insuline plus bas et un meilleur potentiel d’utilisation du gras comme source d’énergie.


Globalement, les différences entre homme et femme en ce qui concerne le jeûne intermittent sont minimes. En plus, il est tout à fait possible d’agir afin d’éviter les troubles de la fertilité induits par une sous-alimentation. Notamment en veillant à manger suffisamment, en évitant de jeûner tous les jours, et pas plus de 14 ou 15 heures.


Et puis, nous venons de le voir, il y a a priori des avantages à être une femme quand on suit un jeûne intermittent. Alors mesdames ne vous inquiétez plus, les nombreux bénéfices du jeûne ne vous sont pas interdits, et la communauté vous attend avec impatience.



Références


(1) Gillies, G. E., & McArthur, S. (2010). Estrogen actions in the brain and the basis for differential action in men and women: a case for sex-specific medicines. Pharmacological reviews, 62(2), 155–198. https://doi.org/10.1124/pr.109.002071


(2) Frazao, R., Dungan Lemko, H. M., da Silva, R. P., Ratra, D. V., Lee, C. E., Williams, K. W., Zigman, J. M., & Elias, C. F. (2014). Estradiol modulates Kiss1 neuronal response to ghrelin. American journal of physiology. Endocrinology and metabolism, 306(6), E606–E614. https://doi.org/10.1152/ajpendo.00211.2013


(3) Meczekalski, B., Katulski, K., Czyzyk, A., Podfigurna-Stopa, A., & Maciejewska-Jeske, M. (2014). Functional hypothalamic amenorrhea and its influence on women's health. Journal of endocrinological investigation, 37(11), 1049–1056. https://doi.org/10.1007/s40618-014-0169-3


(4) Kumar, S., & Kaur, G. (2013). Intermittent fasting dietary restriction regimen negatively influences reproduction in young rats: a study of hypothalamo-hypophysial-gonadal axis. PloS one, 8(1), e52416. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0052416


(5) Heilbronn, L. K., Civitarese, A. E., Bogacka, I., Smith, S. R., Hulver, M., & Ravussin, E. (2005). Glucose tolerance and skeletal muscle gene expression in response to alternate day fasting. Obesity research, 13(3), 574–581. https://doi.org/10.1038/oby.2005.61


(6) Freire, T., Senior, A. M., Perks, R., Pulpitel, T., Clark, X., Brandon, A. E., Wahl, D., Hatchwell, L., Le Couteur, D. G., Cooney, G. J., Larance, M., Simpson, S. J., & Solon-Biet, S. M. (2020). Sex-specific metabolic responses to 6 hours of fasting during the active phase in young mice. The Journal of physiology, 598(11), 2081–2092. https://doi.org/10.1113/JP278806


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